Le gouffre entre chacun d’entre nous

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Souvent, quand, au début d’une discussion, on me demande comment ça va, je glisse vers des choses factuelles qui me sont arrivées, et je les énumère sans vraiment y croire. Je suis allé à tel endroit, j’ai fait telle chose.

Je me sens obligé, en fait, de faire un rapport à la personne qui m’interroge. Comme si les choses vraiment importantes à mes yeux que j’avais faites ou apprises, ne pouvaient être racontées à mon auditeur parce qu’il n’était pas intéressé, que c’était la sacro sainte-politesse, et que j’allais l’ennuyer.

D’ailleurs, dans ces moments là, je suis souvent comme un animal sauvage pris dans les phares de la civilisation. Littéralement. J’en oublie même les belles choses que j’ai vécues ces derniers temps et je ne sais que faire pour satisfaire le bon respect de cet art très français de la discussion. Et je sais que, de base, mon score à ce petit jeu va être déplorable.

C’est pour ça que j’ai lâché l’affaire. J’ai laissé de côté cette illusion qui consiste à chercher à être en accord avec mon interlocuteur. Nous sommes deux êtres humains, et même si nous habitons le même pays, ou si nous sommes au même endroit aujourd’hui, il est très probable que nous ayons des expériences et des visions de la réalité très différentes. Et si ce n’est pas le cas, la personne en face de nous deviendra un très bon ami, ou bien l’est déjà!

Mais ce genre d’étincelles ne se décrète pas. Ni même ne se cherche. J’ai passé ce stade. Nous sommes chacun dans nos bulles. Pire que ça, (ou mieux, c’est selon) nous habitons chacun des planètes différentes. Et je n’aimerais pas envahir la planète de mon interlocuteur, comme je tiens à ce que l’on respecte ma planète.

Mais ça ne veut pas dire qu’on aura jamais de contacts. D’ailleurs, je préfère ce mot à celui de « liens » qui m’angoisse, comme si on était  enchaînés les uns aux autres par des tunnels qui seraient les voies exclusives pour se rendre visite.

Je pense franchement qu’on manque de créativité dans le domaine social et qu’on singe les techniques d’approches des autres dans l’espoir d’en retirer un peu d’inspiration et de ne pas paraître ridicule. Mais j’ai appris que c’est ok de ne pas rentrer en contact avec tout le monde, et que c’est justement l’une des plus belles manières de montrer qui on est. 

Et aussi ..

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