« Grandis un peu ! »
Il n’y a pas très longtemps, on m’a demandé si, selon moi, il était « normal » qu’un adulte ait des peluches, qu’il joue à des jeux vidéos ou qu’il construise des Légos. Cette question m’a fait réfléchir. Pourquoi ces activités sont-elles si souvent perçues comme « enfantines », et pourquoi certains jugent-ils qu’il faudrait s’en éloigner pour « grandir » ?
Si l’on regarde l’histoire, la norme était tout autre : pendant longtemps, les enfants travaillaient comme les adultes. Le travail des enfants en Europe n’a été interdit qu’au 19ᵉ siècle, avec des lois comme celle de 1841 en France. Quant aux peluches, elles étaient encore rares au début du 20ᵉ siècle, et leur fabrication à grande échelle a explosé avec l’industrialisation et la société de consommation. Les jeux vidéos, eux, n’ont émergé qu’à partir des années 1970, et les Légos sont apparus dans leur forme moderne en 1949. Ces objets et loisirs sont donc récents dans l’histoire de l’humanité.
Mais est-ce vraiment mal d’en profiter, même une fois adulte ?
Les peluches nous réconfortent, les jeux vidéos stimulent nos réflexes, notre patience et notre logique, et les Légos développent notre créativité et notre sens de l’organisation. Ce sont des compétences utiles à tout âge, et rien n’interdit de se plonger dans des mondes colorés, joyeux et stimulants.
J’ai moi-même une peluche Pikachu que j’affectionne particulièrement. Elle était rangée dans un carton depuis des années, et je l’ai ressortie avec émotion il y a quelque temps. Elle me rappelle des souvenirs précieux et m’apporte une douce forme de réconfort.
Derrière les injonctions à « grandir », souvent lancées par nos parents ou d’autres adultes, je perçois surtout une forme d’incompréhension et, parfois, de souffrance. Ces anciens enfants n’ont pas toujours eu l’opportunité de s’amuser ou de se détendre dans un monde où les efforts et la discipline dominaient. Pour eux, ces loisirs peuvent sembler superflus ou inappropriés.
Pourtant, savoir se détendre et s’amuser est essentiel pour grandir émotionnellement. Ce n’est pas honteux d’avoir encore besoin de douceur ou de jeu passé un certain âge. Au contraire, ces moments nous aident à équilibrer nos vies et à mieux affronter nos responsabilités.
Bien sûr, comme toute chose, le jeu doit être pratiqué avec modération. Mais grandir, c’est peut-être accepter de s’accorder des moments de joie simple, sans honte ni culpabilité.